Les militaires et politiques

Le colonel Prévost

Résumé

L’Arbresle  a donné son nom à une rue du centre, très fréquentée. Modeste hommage, oh combien mérité ! Nous vous invitons à aller plus loin qu’un « nom de rue », et de faire connaissance avec l’homme qu’était le colonel Prévost.

 

Marius Prévost (Colonel) – 1893-1950

 Compagnon du Tour de France

 Son baluchon sur l’épaule, ses pas l’amenèrent depuis Clamecy, puis Dijon, et tout le long de la vallée de la Saône, jusqu’à l’Arbresle. En cette fin du XIX° siècle, Il était de cette race finissante qui formait des hommes, des artisans ou des ouvriers d’exception : les Compagnons du Tour de France. Il s’appelait Prosper Prévost. Il n’alla pas plus loin.

Il rencontra Marie Antoinette Ferrière, qui était originaire de Pontcharra , et qu’il épousa. La famille Ferrière, depuis des temps immémoriaux était installée entre L’Arbresle et Tarare, souvent paysans, maraîchers ou horticulteurs, et parfois, canuts ou soldats.

Prosper travaillait dans une petite entreprise de plomberie-zinguerie, à l’angle des rues actuellement Charles de Gaulle et Colonel Prévost (où est aujourd’hui la Lyonnaise de Banque). Quand son patron se retira, il racheta l’entreprise et la développa.

Trois fils naquirent : l’un mourut en bas âge, les deux autres nés à la veille de ce XX° siècle riche en massacres allaient s’illustrer dans la défense de leur pays. Emile, sergent au 3ème bis de zouaves, fut tué à Verdun, en 1916, au bois d’Avocourt. Il était décoré de la Croix de guerre et de la médaille militaire.

Prosper fut très affligé par la mort de son fils, qui devait reprendre son entreprise de plomberie. Il la céda à Antonin Sérange, son meilleur ouvrier. Il  décéda en 1924, à l’âge de 59 ans. En 1925, la famille alla s’établir à Bully, hameau de Gruge.

 Le futur Colonel

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 Le dernier fils, Marius est né le 27 avril 1893, Devançant l’appel, dès ses 18 ans, il s’engage au 4ème Tirailleurs Algériens de Tunis et participa comme tel en 1912 et 1913, aux premières opérations de soutien au sultan du Maroc, en difficulté face à l’anarchie dans son pays.

Vient la guerre de 1914-18. Il combat successivement en Alsace, sur la Somme, en Champagne où, en 1915, il reçoit la médaille militaire, « la plus chère de ses décorations ». disait il, sur le champ de bataille à l’âge de 22 ans, en même temps qu’il était promu sous-lieutenant. Voici sa citation :

« Blessé au début de la campagne, le 22 août 1914, est revenu sur le front peu après ; s’est fait remarquer à l’attaque du 25 septembre 1915, en capturant une mitrailleuse et son personnel et en défendant l’accès d’un  boyau sous un feu violent d’artillerie ».

""  Bilma 1923 – La compagnie méhariste, commandée par le capitaine Prévost, au départ pour un contre-rezzou (Des bandes armées venant de Libye  tentaient souvent au cours  de    rezzou sur les oasis ,d’emmener les jeunes femme, les garçons en âge   de porter les armes, et les récoltes…
 

C’est ensuite l’Alsace à nouveau, puis Verdun, l’Aisne, le Chemin des Dames, tous noms fameux de la première guerre, puis l’attaque du moulin de Laffaux, où une balle le blesse très grièvement (une balle de mitrailleuse à la cuisse gauche), pour la seconde fois. Nouvelle citation à l’ordre de la 6°armée :

« Commandant de compagnie, dont le courage, la bravoure et le sang-froid se sont affirmés particulièrement au cours de l’attaque du 23/10/1917. Chargé de l’attaque d’un village, a entraîné sa compagnie dans un superbe élan, progressant sur un terrain extrêmement difficile et opiniâtrement défendu, donnant ainsi à sa troupe un bel exemple d’énergie et d’entrain A été blessé au cours de l’attaque » (attaque d’Allemant – Aisne).

D’autres citations prouvent s’il en était besoin les exceptionnelles qualités de ce grand militaire. On les trouvera plus loin, avec la liste de ses décorations.

II termina la guerre affecté à l’armée d’Orient, et en 1919, sillonne avec elle toute l’Europe Centrale (Roumanie, Sud Autriche. Grèce, Turquie, Hongrie, Bulgarie. Yougoslavie, Monténégro. En 1920, il est chevalier de la Légion d’Honneur.

En juin 1918, le jeune lieutenant Prévost  épouse Marie-Louise Lesna (dont l’unique frère Alphonse, avait été tué lors de la grande attaque de Champagne le 23 septembre 1915).

Ils eurent trois fils :

Emile, né le 16 avril 1919, Robert, né le 13 octobre 1920, Alphonse, né le 31 août 1922. Tous sont des enfants de l’Arbresle.

La génération de leur père a été concernée par deux guerres. La leur aura connu la seconde guerre mondiale. Les fils doivent être associés à leur père, car leurs états de services au service du pays sont eux aussi éloquents.

Emile : engagé volontaire le 15 septembre 1939 (personnel navigant dans l’aviation). Résistant. Légion d’honneur à titre militaire décernée par le général de Gaulle. Croix de guerre 1939-1945. Croix de guerre T.O.E. A partir de 1948, carrière dans l’industrie pétrolière.

Robert : Saint-Cyrien. Maquis du Vercors et de la Drôme 1943-1944, avec le 159ème R.I.A.. Front d’Alsace et des Alpes 1944-1945. Croix de guerre 1939-1945. Croix de la Valeur Militaire (croix de guerre d’Algérie). Puis, Ecole Nationale d’Administration. Sous-préfet.  Secrétaire général de préfecture. A partir de 1962, carrière dans l’industrie automobile.

Alphonse : Envoyé au S.T.O. (Service du Travail Obligatoire). S’évade d’Autriche en septembre 1944. Rejoint le maquis du maréchal Tito. Durs combats durant l’hiver 1944 contre Allemands et oustachis Croates. Commande une compagnie composée de Français, de Russes et de déserteurs Allemands. Croix de guerre yougoslave. Puis carrière dans l’industrie chimique. Il décédera en août 2000.

 

 Prévost l’Africain

     

De 1922 à 1924, on retrouve  Marius en Afrique il est désigné pour l’A.O.F. (Afrique Occidentale Française), où il reçoit le commandement des unités méharistes du Nord du Tchad et du Tibesti. Il avait pour mission de protéger les populations et les territoires du Sahara contre les incursions des pirates libyens. Le territoire sur lequel il exerçait son action avait la superficie de la France.

 De 1924 à 1927, ce sont les opérations du Riff marocain, pendant lesquelles il commande le poste de Téroual, au nord de Fez.

Puis, les années suivantes, c’est de nouveau l’Afrique Occidentale, le Sahara central, le golfe du Benin. Ces régions dont il avait gardé un tel souvenir, qui avaient si bien marqué sa personnalité et qu’avec tant de nostalgie il évoquait  dans une conférence prononcée peu de temps avant de décéder, et qui fut comme son « chant du cygne ».

Après l’Afrique, ce fut ensuite la Syrie, la Palestine, la Mésopotamie, l’Irak, tout ce Proche-Orient aux noms évocateurs, et enfin Madagascar. La  guerre de 1939-40 le trouve à Djibouti au bord de la mer Rouge, sur le front d’Abyssinie, puis il revient en Afrique du Nord.

En 1942 c’est le débarquement des alliés sur le sol d’Afrique ; il est adjoint au commandant de l’armée de Bône et de la région. Puis c’est la préparation du débarquement en Italie (période des gros bombardements du port de Bône), et au moment du débarquement il eut plusieurs fois l’occasion de représenter le général de Gaulle.

""  Bône 1943 (Annaba   aujourd’hui).Le Lt.-Colonel Prévost, commandant la place de Bône,   présente au général de Gaulle les troupes de la garnison

Enfin, il revient en France en août 1945, après une longue absence de 7 ans au cours de laquelle sa famille, en raison des circonstances était restée sans nouvelles de lui.

Après avoir commandé pendant plusieurs mois plus de 18.000 soldats sénégalais, il prend définitivement sa retraite en 1946. Dans cette propriété champêtre de Gruge à Bully où il organisera un véritable musée avec les intéressants et multiples souvenirs rapportés des nations ou colonies françaises dans lesquelles il avait vécu ou qu’il avait traversées au cours de ses nombreuses campagnes.

   

Le 14 juillet 1950, digne couronnement de son admirable carrière, il était promu au grade de Commandeur de la Légion d’honneur. Et le même jour, devant le monument aux morts où se trouve inscrit le nom d’Émile Prévost, frère du colonel, tombé perdant la première guerre, la ville de L’Arbresle pouvait, solennellement, présenter à celui-ci ses hommages et ses félicitations. Car la ville natale du colonel Prévost était à bon droit fière de lui. Elle lui rendait en respectueuse sympathie toute l’affection qu’il lui témoignait.

D’ailleurs, sa retraite n’avait pas pour lui signification d’isolement et il saisissait toutes les occasions de témoigner à ses compatriotes le plus vif intérêt, n’oubliant aucun de ceux qu’il avait connus autrefois particulièrement les plus humbles, et participait a toutes les activités de la cité.

Car le colonel Prévost avait la  mémoire du cœur. Que de fois il a du lutter avec son émotion quand, devant lui, était évoquée la mémoire de ses soldats, spécialement de ces Sénégalais dont il fleurissait encore la stèle peu après la cérémonie du 14 juillet. Et s’il fut un grand soldat, il fut aussi un chef aimé et respecté, et l’on sentait vibrer son âme humaine et tendre lorsqu’il narrait ces longues randonnées d’Afrique où celui qui commande sent parfois peser sur ses épaules de si lourdes responsabilités.

Il devait décéder à Lyon le 22 décembre 1950. Il est inhumé au cimetière de l’Arbresle dans la tombe familiale.

 B.I.

 

Citations
 Ordre de la brigade du 12 avril 1917 :
 « Le 22 mars 1917, son commandant de compagnie venant d’être tué, a pris le commandement de la compagnie dans des circonstances difficiles, a maintenu en place par son exemple et son énergie tous ses hommes, malgré un bombardement intense, suivi d’une violente attaque d’infanterie, a conservé toute ses positions ».
 Ordre de la Division du 18 mai 1917 :
 « Le 11 mai 1917 a, par sa bravoure et son sang froid habituel et grâce à sa vigoureuse intervention, maintenu intégralement le front de son unité fortement attaquée à la grenade et très violemment bombardée ».
 Ordre du régiment du 19 juin 1917 :
 « Officier d’un très grand sang froid et d’un magnifique courage a dirigé brillamment sa compagnie au cours de l’attaque ennemie du 17 juin 1917 où malgré un très violent et un sanglant corps à corps, toutes les positions ont été maintenues ».
 Décorations du colonel  Prévost
 Commandeur de la Légion d’Honneur à titre militaire.
Médaille militaire le 25 septembre 1915.
Croix de guerre 1914-1918 – 5 citations.
Croix de guerre 1939-1945.
Croix du combattant 1914-1918 et 1939-1945.
Médaille Coloniale
Médaille de Verdun
Médaille des blessés
Médaille de la victoire.
Médaille d’Orient
 Les Prévost : des Gens du Nord

 Le nom de Prévost est originaire du nord de la France. Actuellement près de mille familles y sont recensées entre Nord et Pas-de-Calais. Les guerres des XVII° et XVIII° siècles amenèrent une grande misère et  beaucoup de morts. Les uns partirent tenter leur chance notamment au Canada où ce nom est devenu très courant, surtout au Québec ; il existe même une Prévostville.

D’autres encore, moins nombreux, se dirigèrent vers le Sud de la France. C’est ainsi que Claude Antoine Prévost, le grand-père du colonel se retrouve bûcheron dans les forêts du Morvan ; c’est là qu’il fut tué par la chute d’un arbre qu’il abattait.

L’Arbresle conserve le souvenir de Marius Prévost, et la rue qui va de la rue Charles de Gaulle à la place Sapéon porte son nom ; une plaque, est  apposée sur l’immeuble ou vécut la famille.

 

  Sources : Témoignage et documents de Emile Prévost, fils du colonel.

                 Article de presse de Claudia Fougère.

 

 

 

 

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